Variant Delta (indien) : combien de cas, dans quels départements en France est-il le plus virulent?
VARIANT INDIEN. Alors que la France fait face à un rebond de l’épidémie de Covid-19 lié au variant Delta (indien), devenu majoritaire sur le territoire, le Conseil scientifique a publié ce vendredi une série de recommandations pour endiguer la circulation de cette souche beaucoup plus contagieuse.
[Mis à jour le 9 juillet 2021 à 15h10] Les craintes des autorités sanitaires se sont avérées justes : le variant Delta du coronavirus sera « bientôt majoritaire » en France, « probablement dès ce week-end », a annoncé Olivier Véran ce vendredi 9 juillet sur France Inter. Ce nouveau variant, d’abord qualifié de variant indien après avoir été détecté en Inde, est « 60% plus contagieux que les autres souches virales » et est « en train progressivement de remplacer tous les autres virus », a précisé le ministre de la Santé. Face à cette menace, le Conseil scientifique a axé son dernier avis, daté du 6 juillet mais publié ce vendredi, sur des mesures visant à « limiter une nouvelle vague associée au variant Delta ».
« Le variant Delta représente 40% des nouvelles contaminations en France métropolitaine et sa présence est hétérogène selon les territoires », souligne-t-il dans cet avis. De fait, « une nouvelle vague doit être collectivement anticipée », d’autant plus que ce rebond « ne pourra pas être complètement absorbé par le niveau élevé de la vaccination, qui reste encore insuffisant au sein de la population pour assurer une protection collective efficace ».
Le Conseil scientifique recommande ainsi d’envisager « un retour à des mesures partielles de restriction, y compris en juillet et en août et dans des zones de vacances », dans les départements où le taux d’incidence remonterait de façon significative, en raison de la circulation du variant Delta. Autre mesure pour renforcer l’arsenal de lutte, les membres du Conseil préconisent de revoir à la baisse la jauge retenue pour la tenue d’évènements avec pass sanitaire.
Quelle est la part du variant Delta en France ?
On peut mentionner trois séries de données pour prendre la mesure de la progression du variant Delta en France. D’abord, selon les toutes dernières données publiées par Santé publique France sur son site et portant sur la semaine du 29 juin au 5 juillet 2021, 4517 résultats positifs pour la mutation L452R, portée notamment par le variant Delta, ont été enregistrés sur 11 230 résultats de criblages, soit 47,3% des tests PCR positifs criblés. On comptait 1762 résultats positifs pour la mutation E484K (portée par les variants sud-africain et brésilien), soit 18,6% des PCR criblées et 91 résultats positifs pour la mutation E484Q (marginale), soit 1,0% des PCR criblées.
Dans son bilan épidémiologique hebdomadaire, publié chaque jeudi soir, Santé publique France indique par ailleurs que sur la semaine 26 (du 28 juin au 4 juillet), la mutation L452R, portée notamment par le variant Delta, était retrouvée dans 43% des PCR de criblage, contre 21% la semaine précédente. Des chiffres qui font dire que la proportion de variant Delta parmi les tests positifs au coronavirus a plus que doublé en une semaine. Il faut noter néanmoins que seuls 48% de l’ensemble des tests positifs pour le SARS-CoV-2 sont aujourd’hui « criblés », autrement dit analysés pour faire apparaitre des mutations et donc des variants. En semaine 26, les mutations E484K (propre aux variants sud-africain et brésilien) et E484Q (très marginale) ont été détectées dans respectivement 19,1% et 0,8% des prélèvements positifs criblés recherchant ces mutations.
Le variant Alpha (britannique), lui, n’est plus systématiquement cherché dans les tests criblés depuis début juin. Il était en effet devenu très largement majoritaire (90%) au printemps. Mais Santé publique France mène des enquêtes dites « Flash » qui ont fait apparaitre, dès le 22 juin 2021, qu’il était « en nette diminution ». Il représentait 47,8% des séquences interprétables dans l’enquête Flash #12, contre 77,0% dans l’enquête Flash #11. Dans la même enquête, le variant Delta est passé de 8,5% à 30,5% en deux semaines. Selon ces enquêtes Flash, le variant Beta, identifié initialement en Afrique de Sud, était majoritaire à La Réunion où il représentait 100% des cas mais restait très minoritaire le territoire métropolitain (4,5% dans Flash #12). Enfin, le variant Gamma (brésilien) était largement majoritaire en Guyane, « avec une prévalence supérieure à 85% », mais se maintenait lui aussi à un niveau « très faible ailleurs en France » (0,4% des séquences interprétables de l’enquête Flash #12).
Attention : seule la moitié des tests environ (48%) est aujourd’hui criblée, c’est à dire analysée pour identifier une mutation. Par ailleurs, rappelons que depuis le 31 mai, dans les tests de criblage, Santé publique France ne cherche pas précisément le variant Delta, mais trois types de mutations : la mutation E484K portée notamment par les variants Beta et Gamma, la mutation E484Q très marginale et la mutation L452R portée notamment par le variant Delta. L’agence estime qu’une grande majorité des tests faisant apparaitre la mutation L452R (au moins les 2 tiers) correspondent bien au variant Delta.
Carte du variant Delta en France
Géodes a publié pour la première fois le 1er juillet une carte présentant le criblage de la mutation L452R, caractéristique du variant Delta en France. Elle est depuis mise à jour au quotidien avec les dernières données disponibles. Santé publique France indique que la variant Delta est réparti avec « une grande hétérogénéité » sur le territoire, avec une forte poussée en Ile-de-France, en Nouvelle-Aquitaine et en Auvergne-Rhône-Alpes.
Le variant Delta peut-il être à l’origine d’un rebond épidémique en France ?
L’épidémie de coronavirus ne recule plus depuis près de deux semaines désormais (voir les derniers chiffres) et le variant Delta semble donc changer la donne. D’où l’appel à la prudence et au maintien des gestes sanitaires des professionnels de santé ou encore du ministre de la Santé, Olivier Véran. Sur France Inter ce 9 juillet, ce dernier a indiqué que « chaque semaine, il y a environ 50% de contaminations en plus que la précédente » et rappelé que « c’est ce que nous avons connu au démarrage des vagues passées ». « Il se passe un phénomène assez proche de ce qu’on a connu l’été dernier : le virus touche essentiellement des personnes jeunes, entre 20 et 40 ans, qui font peu de formes graves, mais qui sont aussi moins vaccinés », a ajouté le ministre de la Santé.
Dans sa dernière publication datée du 29 juin, l’Institut Pasteur mettait en garde sur un possible rebond épidémique à l’automne dans le cas où toutes les mesures de contrôle disparaissaient. « Dans notre scénario de référence caractérisé par une couverture vaccinale de 30%-70%-90% chez les 12-17, 18-59 et plus de 60 ans et un nombre de reproduction de base R0=4, un pic d’hospitalisations comparable au pic de l’automne 2020 pourrait être observé en l’absence de mesures de contrôle » indiquent les experts dans leur rapport publié le 28 juin. L’institut de recherche insiste sur la protection que consacre la vaccination contre le virus : « une personne non-vaccinée a 12 fois plus de risque de transmettre le SARS-CoV-2 qu’une personne vaccinée. » D’après les chiffres exposés, les personnes de plus de 60 non-vaccinées représentent tout juste 3% de la population mais 35% des patients hospitalisés.
L’institut Pasteur recommande de maintenir des mesures de protection en parallèle de la vaccination. Etonnement les experts font savoir que l’application des mesures barrières par les personnes vaccinées « apporte peu de bénéfices supplémentaires », les mesures doivent surtout cibler les personnes non-vaccinées. Toutefois ils reconnaissent qu’une application différenciée selon la vaccination « soulève des questions éthiques et sociales qu’il est important d’explorer ».
Qu’est-ce que le variant Delta ?
Le variant Delta est considéré comme un « mutant multiple ». Il résulte en fait d’une rencontre entre la souche californienne, L452R, et de la mutation sud-africaine, E484K. Mais ce virus indien comporte également d’autres mutations. E484Q et L452R permettent au coronavirus de mieux s’accrocher aux cellules pour se répandre plus facilement. En outre, de récentes études montrent que L452R est plus résistante aux anticorps, explique dans Le Figaro le Pr Gautam Menon, professeur de physique et de biologie à l’université Ashoka, près de New Delhi.
Un variant Delta et un variant Delta Plus
Le ministère indien de la Santé a annoncé, mercredi 23 juin, avoir repéré une nouvelle mutation du Covid-19, nommée Delta Plus, et qualifiée de « préoccupante ». Trois États du pays sont sous surveillance. Ce variant serait encore plus transmissible que le variant Delta. D’après une étude du Public Health England, le variant indien pourrait entraîner la multiplication des hospitalisations. Après l’analyse de près de 38 000 séquences du virus, les chercheurs estiment désormais que le variant « Delta » aurait un risque d’hospitalisation 2,61 plus élevé, par rapport au variant britannique.
À cause de cette nouvelle forme, les commerces « non essentiels » sont de nouveau tenus de garder porte close le week-end, dès lors que, localement, le taux de positivité des tests de dépistage, en moyenne sur sept jours, dépasse 5 %, ou que le taux d’occupation des lits d’hôpitaux équipés en oxygène dépasse 40 %. Le variant Delta Plus aurait été identifié à ce stade chez cinquante-cinq patients. D’après le ministère indien de la santé, ce nouveau variant est caractérisé par « une contagiosité accrue, une capacité plus forte à se lier aux récepteurs des cellules pulmonaires et un effet potentiellement réducteur de la réponse des anticorps monoclonaux » à sa présence dans le corps.
Mais pour l’épidémiologiste Chandrakant Lahariya, « le Delta Plus n’est pas très différent du Delta et il n’a pas suffisamment muté pour pouvoir déclencher aussi rapidement une troisième vague en Inde, où la population a sans doute déjà été contaminée à 60 % ou 70 % par le coronavirus sous ses formes précédentes ».
Quels sont les symptômes du variant Delta ?
Les symptômes sont ceux du coronavirus. Anurag Agarwal, directeur de l’Institut de génomique et de biologie intégrative de Delhi, a expliqué auprès du Figaro il y a quelques semaines que les malades souffraient par ailleurs « de maux de tête, de congestion nasale, de maux de gorge, de douleurs musculaire ». « On en voit atteints de diarrhée, comme ce fut le cas à New York l’an dernier. » Et d’ajouter : « Et le climat étant chaud et sec cette saison, certains saignent du nez ou de la gorge parce qu’ils toussent ou éternuent davantage ».
Selon Tim Spector, professeur d’épidémiologie génétique au King’s College à Londres, le variant Delta « ressemble plus à un mauvais rhume chez les populations plus jeunes et les gens ne le réalisent pas. Cela signifie que les gens pensent avoir un rhume saisonnier, donc ils continuent à sortir faire la fête, et donc inconsciemment peuvent transmettre le virus autour. »
La vaccination préserve-t-elle du variant Delta ?
Les études empiriques démontrent que la vaccination permet de considérablement limiter la circulation du variant et son infection. Un rapport technique du Public Health England, daté du 18 juin, donne les statistiques suivantes : au Royaume-Uni, depuis le 1er février 2021, 35 521 cas d’infections au variant Delta ont été identifiés chez des personnes non vaccinés, 4094 cas chez des sujets ayant reçu un première dose de vaccin depuis moins de 21 jours, 9461 cas chez des personnes ayant reçu une première dose vaccinale depuis plus de 21 jours, et 4087 cas chez des personnes ayant reçu une deuxième dose depuis plus de 14 jours. Autre élément rassurant, si les contaminations repartent à la hausse au Royaume-Uni, la vaccination protège des formes graves du coronavirus.
En France, la Haute Autorité de Santé considère dans un avis publié le 21 juin que pour « limiter la diffusion du virus notamment celle de variants plus contagieux tel que le variant Delta », il faut « une stratégie de vaccination réactive ». Cela signifie, aussi rapidement que possible, « vacciner l’ensemble de l’entourage des cas (c’est-à-dire l’ensemble des individus du foyer du cas détecté, des personnes à son lieu de travail et/ou à l’école/université) ».
Le vaccin Pfizer protège-t-il du variant Delta ?
Selon une étude de The Lancet sur l’efficacité du vaccin Pfizer sur le variant Delta, chez des gens vaccinés avec deux doses de Pfizer/BioNTech, le niveau d’anticorps neutralisants est près de six fois moins élevé en présence du variant Delta qu’en présence de la première souche du virus. « Après une seule dose de Pfizer/BioNTech, 79% des personnes avaient une réponse anticorps détectable contre la souche originelle (du virus), mais cela tombait à 50% pour le variant Alpha, 32% pour le variant Delta et 25% pour le variant Beta » explique l’étude. Selon une seconde étude réalisée par l’Institut Pasteur, les anticorps neutralisants produits par la vaccination avec Pfizer/BioNTech sont trois à six fois moins efficaces contre le variant Delta que contre le variant Alpha.
Le vaccin AstraZeneca est-il efficace contre le variant Delta ?
Selon une étude britannique du Public Health England, deux doses du vaccin AstraZeneca/Oxford protègent à 92% contre les hospitalisations après avoir contracté le variant Delta. Des résultats, « comparables à l’efficacité du vaccin pour éviter l’hospitalisation liée au variant Alpha », conclut les responsables de l’étude. Malgré tout, une étude du même centre montrait une efficacité affaiblie contre les formes symptomatiques de la maladie : 60% contre le variant Delta, contre 66% pour le variant Alpha. Selon l’étude de l’Institut Pasteur, une dose unique d’AstraZeneca serait « peu ou pas du tout efficace »contre le variant Delta.
Moderna est-il efficace contre le variant Delta ?
Comme pour le vaccin Pfizer, le variant Delta use de la technologie ARN messager et devrait être efficace face à ce dernier. Toutefois, l’étude des autorités sanitaires britanniques a révélé que le nombre de personnes qui l’avaient reçu était trop petit pour qu’ils l’incluent dans leurs recherches ».
Le vaccin Janssen inefficace contre le variant Delta ?
Impossible à dire pour le moment. Fin mai, Alain Fischer expliquait qu’il n’y avait pas « encore d’informations ». Malgré tout, le vaccin « a démontré une efficacité clinique contre les Covid-19 symptomatiques, y compris contre le variant B.1.351 (Beta) », comme l’explique une étude de Nature début juin. Attention toutefois car les scientifiques prônent deux doses de vaccin pour lutter contre le variant alors que le vaccin Johnson & Johnson est le seul vaccin à une dose.