Le soleil se couche à l’ouest
Un soleil estival se lève lentement pour éclairer d’une teinte chaude des murailles majestueuses. Je contemple ces remparts qui se colorent semblant prendre vie pour devenir accueillant après une nuit de garde.
C’est à ce moment là que la curiosité me pique pour découvrir ce qui se cache à l’intérieur, quel trésor se cache derrière ? Je jette un coup d’œil à travers les portes qui percent cette muraille et voilà qu’une brise marine fraîche vient me caresser le visage. Cette sensation agréable s’accompagne d’une frustration d’un geste incomplet. La brise marine amène avec elle un relent d’une odeur que j’ai du mal à identifier immédiatement.
Cette odeur ne s’apparente pas à la mer, elle est lancinante et tenace ! Une odeur chimique qui me recouvre d’une pellicule crasseuse, voilà la sensation que j’ai. Mon esprit se détourne de l’allégresse d’une brise marine un matin d’été vers le paysage des cheminées industrielles.
C’est alors que j’identifie l’odeur caractéristique du souffre ! Cette combinaison entre la brise marine et le dégagement des industries chimique me pousse à aller découvrir son essence. Je me dirige alors vers la mer qui m’a caressé le visage. Mais où est elle je ressens sa présence mais je ne la vois pas.
Je vois de beaux bâtiments, qui mériteraient une remise en beauté, mais point de rivages. Je demande à un passant pressé qui court vers l’intérieur des remparts, y aurait-il une mer proche ? Oui elle est derrière ce bâtiment majestueux au centre de cette place au bout de cette allée en chantier ! Je m’avance en contemplant ce cartier qui dégage la présence d’une âme diffuse, l’âme d’une ville majestueuse qui se perd entre les amas de pierres, les gravats et les bâtisses qui semblent en friche.
Cette âme qui se cherche est bien présente et apporte une sensation apaisante d’une ville chaleureuse. Je contourne ce bâtiment dont l’architecture me rappelle les remparts que j’ai contemplé, les minarets des mosquées qui dépassent et qui me projette vers une autre civilisation plus occidentale. Je m’avance dans cette rue qui devrait m’emmener vers la mer que je n’arrive encore pas à entrevoir. Je sens que je m’approche quand je dépasse cette salle de cinéma fermée et barricadée. Quel drame a-t-elle subi ? Y aurait-il eu carnage ? Je me promets de m’enquérir de ce qui s’est passé et je continue ma quête vers un rivage trop bien caché.
Je lève mon regard vers le bout de la rue et je vois une cheminée qui n’est ni industrielle ni domestique. C’est un cargo qui semble échoué sur le béton hors de la mer que je ne vois pas. Un mur et un portail me cachent l’horizon marin. Pourrais-je la voir pour m’assurer que ce n’est pas un mirage.
Je demande à un passant, toujours pressé, serait-il possible de voir la mer ? Oui, mais il faudra contourner ce mur en passant sous cette passerelle qui ressemble au tentacule d’un monstre métallique.Je m’avance avec méfiance, est ce vraiment le chemin menant à la mer ou vers une friche industrielle mal fréquentée ? Je longe une voie ferrée recouverte d’une poussière jaune et l’odeur du souffre me prend la gorge. Je viens de résoudre une partie du mystère de cette brise marine aux relents chimiques.
C’est alors que j’entrevois entre les conteneurs la couleur caractéristique de la mer. J’accélère mon allure pour découvrir une plage, moins large que ce que je croyais mais elle était là ! Il y avait des gens de tout âge qui s’y baignent, c’est joyeux et exaltant me faisant oublier le chemin parcouru pour y arriver. Deux épines se prolongent dans la mer servent de support aux pêcheurs qui surveillent leurs cannes à pêche. Je parcours la plage du regard en évitant les objets incongrus qui viennent ternir l’image : des conteneurs vides, des citernes, de la ferraille et un talus sur la droite qui vient couper l’élan de cette plage.
Je m’avance et je grimpe sur le talus pour découvrir un terrain immense inexploité longeant une plage désespérément vide. Le contraste est saisissant entre une petite plage pleine est joyeuse et une grande plage vide et terne. Mais pourquoi cette plage est vide ? Pourquoi ce talus ? Pourquoi ce mur ? Pourquoi inexploitée ? La réponse n’est pas évidente ! Serait-elle impropre à la baignade ? Serait-elle une plage privée ? Non cela n’existe pas il n’y a que la population qui en est privée ! Je m’aventure sur cette plage déserte, je marche sur le sable et dans l’eau. Ma chaussure en souffre mais je n’y fait pas attention. Je profite de l’instant avec dans ma tête plein de pourquoi. J’aperçois une colline boisée.
Je m’y aventure, c’est agréable mais trop vide comme désertée par les habitants frappés par je ne sais quelle malédiction. De cette hauteur je retrouve les remparts que j’ai quitté ce matin. Ma curiosité d’explorer l’intérieur me revient et je décide de m’y rendre. Mais le chemin est coupé, impossible d’atteindre ces remparts tout proches. Des murs et des voies ferrées me barrent la route.
Ces remparts si proches et si lointains m’appellent et je les rejoins, en rebroussant chemin.Je me retrouve devant cette porte qui enjambe un flux incessant de passants. Une odeur agréable de pain chaud fait gargouiller mon estomac. Je pénètre et je fais quelques pas, je vais à droite et à gauche.
Les échoppes proposent de tout, les clients négocient et les marchants s’ingénient à vendre. Je me retrouve devant un maroquinier auquel je demande de réparer ma chaussure, ce qu’il fait en deux tours de mains pour une somme dérisoire. Je discute avec lui, il est accueillant, des passants se joignent à la discussion pour raconter leur nostalgie d’un temps de gloire révolu.
Des jeunes regrettent une époque qu’ils n’ont pas vécu ! Je continue mon chemin pour m’arrêter dans un restaurant servant des fruits de mer et des poissons frais, un repas exquis ! Je flâne dans ces ruelles étroites et chargées d’histoire radieuse que le présent ne reflète pas. Un sentiment mitigé me prend quand je traverse des souks pleins de senteurs d’épices, de bijoux et d’étoffes. Une ville plusieurs fois centenaire vivante mais abandonnée, une citée hors du temps. Je traverse un marché de fruits et légumes et une deuxième porte témoin des temps anciens. Je me retrouve dans un marché aux poissons bien fournis, surchargé et quasiment irréel.
Je le traverse en me sentant fier de son existence. Je sors de cet espace fabuleux quand le soleil se couche derrière des bâtiments modernes, je sors à l’ouest de la ville en me demandant quelle est la porte d’entrée ? Sfax regarde-t-elle vers l’horizon marin ou terrestre ? Elle est la passerelle entre la terre et la mer, l’histoire et le présent, la nostalgie et l’espoir !