FCR : Les dessous d’un retour au décret de 1995. Lequel, l’original ou le modifié et à quel prix ?

Recevant la cheffe du gouvernement, le 17 juin 2022, le chef de tout l’Etat tunisien donnait ses instructions pour un retour à l’application du décret du 23 janvier 1995 fixant les avantages fiscaux accordés aux Tunisiens résidant à l’étranger (TRE), notamment pour l’importation d’un véhicule (tourisme ou commercial) ou d’une moto.
Ce retour annule donc le dernier décret en date, le décret du 13 mars 2018, en ce sens surtout qu’il supprime la condition d’incessibilité de la voiture ou de la moto importée par un TRE pendant une année à courir à partir de la date d’immatriculation en Tunisie. Ce décret de 2018 ne s’appliquera donc plus, ni celui de 2012 d’ailleurs, et les TRE ne seront donc désormais tenus qu’à l’observation des conditions définies par le décret de 1995.
– Ce n’est pas que pour les beaux yeux des TRE
Ce retour aux sources de 1995 n’est cependant pas uniquement décidé pour les beaux yeux des TRE. Loin s’en faut, car la Tunisie est désormais aux abois du moindre Dinar à récolter à travers les différents droits et taxes. Et c’est le même Etat qui remarque que les TRE ne font pas toujours la queue pour aller régulariser la situation de leurs véhicules importés en FCR, dans une Tunisie où il y a carrément un marché de « vente » de ce privilège fiscal. Comme le montre le tableau ci-dessous, le nombre des régularisés baisse d’une année à l’autre, et les recettes de l’Etat aussi.

Et c’est en réinstaurant la primauté du décret de 1955, plusieurs fois retouché, que l’Etat tunisien compte booster les demandes de régularisation, tant en retour définitif, que sous régime RS, pour augmenter le montant de ses recettes.
– L’âge du véhicule fait encore débat
La condition d’un an d’incessibilité résolue, il faudra aussi au ministère des Finances décider lequel des décrets de 95-197 appliquer pour l’âge des voitures de tourisme et les utilitaires. En effet, le fameux article de 1955 avait été maintes fois retouché, au moins en 2012 et 2018.
A l’origine, le décret 95/197 disposait que l’âge maximal du véhicule à importer ne devra donc pas dépasser les 3 ans pour les voitures de tourisme et de 5 ans pour les véhicules utilitaires y compris les véhicules tout-terrain, et ce à partir de la première date de mise en circulation.
Le décret avait été amendé en 2007 sans aucun changement pour l’âge des véhicules, en 2012 et en 2018. En 2018, le décret avait été modifié, mais pas au titre de l’âge des véhicules à importer en retour définitif ou sous le régime RS. L’amendement de 2012, comme il est clairement dit sur le site de la Douane tunisienne (Ar), avait instauré l’âge maximal à 3 ans pour les voitures de tourisme et 5 ans pour les utilitaires de moins de 3,5 tonnes, et l’amendement de 2018 n’y a pas changé.

Avec la cheffe du gouvernement le 17 juin 2022, Kais Saïed avait parlé d’amender le décret de 2018 (qui avait par ailleurs un amendement du décret de 1995). On suppose donc que l’âge du véhicule pourrait de nouveau être amendé, ce que ne souhaiteraient pas les concessionnaires de voitures en Tunisie ; cela d’autant que l’instruction de Kais Saïed était claire et précise : « Retour au décret de 1955 ».
– Les prix des voitures changeront-ils par le retour au décret de 1995 ?
Cela évitera à la Tunisie, comme ils le soutiennent, d’importer les vieilles carrioles et autres véhicules déchets de l’Europe, avec tout ce que celui inclut en importation de pièces détachées, en hausse de consommation d’essence. Cela démontre aussi que la Tunisie reste sérieuse dans sa politique de transition énergétique en matière de transport.
Or, les TRE, c’est un poids politique et une importante force de lobbying à l’intérieur du pays, notamment chez les tenants du marché parallèle, qui pourrait pousser le ministère des Finances, et tout le gouvernement, à aller au-delà du décret original. Car c’est uniquement le marché parallèle et les tenants du marché des voitures usagées, qui pourraient voir les prix de leurs voitures diminuer en inondant le marché de vieilles voitures dont l’Europe veut se débarrasser en migrant vers l’hybride et l’électrique, et non les concessionnaires du marché régulier, qui paient toujours plus de taxes, droits de douanes et impôts divers à l’Etat